18.8.08

La lutte pour la surexistence (4)

Sénèque dans ses Lettres à Lucilius (LIV) : « Il faut louer et imiter ceux qui n’ont pas regret de mourir tout en aimant à vivre. Quel mérite en effet de sortir quand on vous chasse ? C’en est encore un pourtant : je suis chassé, mais je sors comme si je ne l’étais point. Aussi ne chasse-t-on point le sage ; le mot suppose l’expulsion d’un lieu qu’on quitte malgré soi. Le sage ne fait rien malgré lui : il échappe à la nécessité ; car il veut d’avance les choses auxquelles elle le contraindrait. » Voilà en effet ce à quoi se préparent tous ceux qui placent la perfection de leur existence bien au-dessus de sa simple continuation. Le suicide stoïcien et toutes ses justifications expriment la lutte pour la surexistence à son point de retournement rationnel – lorsque le souvenir d’une existence intensifié par l’instant de son achèvement public devient l’expression la plus haute et la plus durable de celle-ci. Cette issue est aussi la plus rare, elle intervient généralement dans les formes tardives de l'existence, lorsqu'elle a perdu la tension vers son dépassement, lorsqu'elle tombe au geste qui la pousse et que l'on n'a désormais plus la force d'être ce geste-là.

Aucun commentaire: