Bienvenue chez les Chtis, sorti le 27 février 2008, a dépassé ce jour les 15 millions d’entrées, et représente d’ores et déjà l’un des plus grands succès du cinéma français depuis 40 ans. Le film est pourtant médiocre : comique de répétition où l’on est supposé s’esclaffer à chaque échange en patois nordiste, psychologie sommaire du gars du Sud découvrant que les gars du Nord ont grand cœur, historiettes d’amour qui commencent mal et finissent bien. Un scénario aussi plat qu’un paysage de Flandres, donc, enrobé d’une dégoulinade de bons sentiments faisant consensus.
Samedi dernier, à la finale de la coupe de football opposant Lens et le PSG, les supporters parisiens ont déployé une banderole où l’on pouvait lire : « Pédophiles, chômeurs, consanguins : bienvenue chez les Chtis ». Un acte idiot et de mauvais goût, sans aucun doute. Mais cette banderole provoque un psychodrame national où les hommes politiques, Président de la République en tête, s’épanchent à n’en plus finir sur « l’inadmissible », « l’intolérable », « la haine », « la violence », « la souffrance », « la dignité » - bref, la mobilisation générale des grands concepts victimaires. A peu près comme si un nettoyage ethnique avait rasé une ville. Sauf qu'il s'agit d'une simple banderole brandie par des demi-débiles mentaux.
Cette double disproportion est révélatrice. Une certaine France sans perspective ni dynamisme fantasme sur la représentation factice et sur la négation factice de l’identité. Et fait semblant de croire que tout cela a la moindre importance. Je me demande parfois si je suis le seul à me sentir aussi étranger à mon propre pays, que je regarde avec une distance toujours croissante, sans aucune émotion, comme on observe les résultats d’une expérience ratée pour en tirer quelques enseignements.
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2 commentaires:
la question qui me vient à l'esprit est : dans quel pays me sentirais-je bien (mieux)? La deuxième : est-ce vraiment une question de pays?
Je l'ignore. Je ne cherche pas tellement un pays où me sentir mieux, encore que j'aurais certainement testé l'émigration si mon travail le permettait. Je regarde simplement le mien comme ce cas clinique, en me demandant en qui me touche affectivement dans ma "société", ce qui me rattache symboliquement à ma "nation", ce qui m'intéresse intellectuellement chez ses "représentants" (politiques, médiatiques, etc.). Mais peut-être que ce détachement concerne les faux-semblants de tout Etat-nation démocratique et de ses reliquats des sociétés de masse, après tout. Disons dans ce cas que la propension française à tout régler par l'Etat accentue alors ma distance.
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