29.3.08

Neurostimulation, choix individuels et morale publique

Selon Jean-Yves Nau dans Le Monde, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Assemblée nationale) vient de conclure que la prochaine loi de bio-éthique, prévue pour 2009, devra prendre en compte « les prodigieuses et parfois inquiétantes perspectives ouvertes par les progrès des neurosciences ». Le journaliste souligne : « Les progrès de l'exploration cérébrale laissent même entrevoir un temps, peut-être moins lointain qu'on pourrait le croire, où les interventions sur le cerveau n'auraient plus pour objectif de dépister ou de soigner, mais d'améliorer les performances physiques ou intellectuelles. » Et il pose notamment la question : « Comment le législateur pourrait-il ne pas se prononcer sur des entreprises qui viseront à produire, autant que faire se pourra, des êtres humains "améliorés" ? » Ma réponse est assez simple : la façon dont les individus ont envie ou non de s’améliorer ne regarde pas le législateur, qui n’a donc pas à prononcer quoi que ce soit à ce sujet dans le cadre d'une loi bio-éthique. Les molécules visant à augmenter les capacités physiques ou intellectuelles des individus devront obtenir une autorisation de mise sur le marché, comme toutes les autres. De même (dans un lointain avenir tout de même) pour d'éventuels implants. Le rôle des pouvoirs publics s’arrête à ce contrôle de qualité clinique et toxicologique.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

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Lorsqu'on aborde avec quiconque le sujet d'une éventuelle amélioration de l'humain, on constate presque toujours que cela est perçu sur fond de nazisme et donc de danger incommensurable.

Il est très difficile de faire admettre la différence de concept qui existe entre une amélioration décidée par l'État et une amélioration décidée par l'individu.

Comme d'habitude, le législateur ne cherche pas à élever le peuple au niveau d'une logique dont la générosité lui échappe, mais à se rabaisser au niveau de ce peuple en le flattant dans le sens du poil de la façon la plus dégoûtante.

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C. a dit…

Oui, j'aurai sûrement l'occasion de revenir sur ce genre de procédés rhétoriques disqualificatoires (nazisme, eugénisme, etc.).

Il y a les gens qui sont gênés par l'idée même d'amélioration, généralement des croyants (monothéistes croyant en un message unique de Dieu, monohumanistes croyant en une image unique de l'Homme, naturalistes croyant aux vertus intrinsèques d'une Nature inchangée, etc.)

Quand on creuse un peu, on voit que d'autres gens sont souvent gênés à l'idée que certains puissent s'améliorer, mais pas d'autres. Le problème est que si l'on milite trop activement pour l'amélioration de tous, on en revient à des formes d'eugénisme d'Etat que l'on condamne par ailleurs. Mais de toute façon, l'objection est secondaire : on peut militer pour la gratuité ou la plus grande accessibilité des techniques d'auto-optimisation, c'est un débat surtout économique, et non plus philosophique. Le point focal du conflit d'idées en cours, c'est la possibilité pour un individu de modifier son corps comme il l'entend. Les conditions pratiques de cette possibilité viennent ensuite.