25.7.08

Les voix du passé

L’être humain parle, mais avant cela il crie et il pleure, dès sa naissance, sans aucun besoin d’apprentissage. La vocalisation est extrêmement répandue dans le règne animal. Les mammifères et les oiseaux ont particulièrement développé ce trait, mais on le trouve aussi bien chez les insectes, les reptiles, les amphibiens et les poissons. Elle sert dans de nombreux contextes sociaux : l’agression, la peur, la surprise, la recherche de partenaire, la communication parent-enfant. Les vertébrés terrestres vocalisent généralement par des organes spécialisés de vibration de l’air dans le tractus respiratoire (larynx chez les amphibiens, reptiles et mammifères, syrinx chez les oiseaux). Les poissons utilisent plutôt leur vessie natatoire, fonctionnant comme une chambre à air de résonance amplifiant certains sons produit par vibration.

Dans la dernière livraison de la revue Science, Andrew H. Bass et ses collègues ont entrepris de rechercher l’origine évolutive de la vocalisation, plus précisément des réseaux neuronaux en charge de la contrôler. Comme tous les vertébrés ont pour ancêtres des poissons (aujourd’hui de la classe des actinoptérygiens), ils ont examiné trois espèces d’entre eux – Opsanus beta, Opsanus tau, Porichthys notatus – pour analyser chez les larves le développement du système vocal. Ils ont observé par microscopie confocale que les neurones fonctionnels de la vocalisation se développent dans la moelle épinière et le tronc cérébral (particulièrement le compartiment du rhombomère 8). Or, ces motoneurones vocaux sont conservés chez les autres espèces de vertébrés, y compris les mammifères : cela indique leur apparition très ancienne et leur forte conservation dans l’évolution. Chaque famille du vivant a en revanche rapidement développé des spécificités ; par exemple, les motoneurones se projettent tantôt par le nerf occipital (poissons), hypoglosse (oiseaux) ou vague (amphibiens et mammifères). Et bien sûr, l’apprentissage par vocalisation n’a émergé que rarement, chez quelques espèces dont la nôtre.

Référence :
Bass A.H. et al. (2008), Evolutionary origins for social vocalization in a vertebrate hindbrain–spinal compartment, Science, 321, 417-421, doi: 10.1126/science.1157632

Illustration : le poisson crapaud (Opsanus tau) possède la même configuration basale que la nôtre pour ses vocalisations (Encylopedia Britannica, DR).

2 commentaires:

Anonyme a dit…

je trouve ce poisson très mignon

C. a dit…

Oui, moi aussi. Quand on songe que Céline Dion chante en raison d'un tronc cérébral partagé avec lui, on comprend tout...