12.7.08

Généalogies de la morale

En neurosciences, la recherche sur l’origine de nos jugements moraux a approfondi les bases émotives de ceux-ci. Plusieurs expériences ont en effet montré que le cerveau des sujets adultes confrontés à des situations classiques de dilemmes moraux active d’abord des aires dédiées au traitement des émotions, la réflexion venant par la suite. Il semble notamment que l’empathie, c’est-à-dire la capacité à se représenter les états d’esprit d’autrui, conditionne notre disposition à la morale. Des chercheurs de l’université de Chicago ont voulu savoir si ces traits observés chez l’adulte sont aussi présents chez l’enfant, ou s’ils apparaissent plus tard au cours du développement.

L’étude a porté sur 17 enfants âgés de 7 à 12 ans, dont neuf filles, connaissant un développement normal. Les enfants ont regardé des mises en scène d’individus souffrant de manière accidentelle ou provoquée. Dans le même temps, leur cerveau était examiné en imagerie par résonance magnétique fonctionnelle. Les scènes de souffrance accidentelle ont activé les mêmes zones que celles observées chez des sujets adultes : insula, cortex somatosensoriel, cortex cingulaire antérieur médian, zones motrices. Et dans le cas des souffrances volontairement infligées, les régions du cerveau engagées dans le raisonnement social et moral des adultes ont été également activées : amygdale, cortex orbitofrontal médian, jonction temporo-pariétale, avec un éveil globalement plus prononcé des régions fronto-pariétales dédiées à l’attention.

Il faudra donc examiner des sujets de moins de 7 ans pour modéliser la genèse de l’empathie chez l’humain. Et lorsque ces résultats seront validés sur des échantillons plus large, il faudra encore examiner plus finement quel genre de situation soulève ce type d’activation cérébrale (autre que la souffrance évidente), mais aussi quelles sont les différences interindividuelles dans la capacité d’empathie ou d’analyse morale des situations. Il semble par exemple que certains troubles du comportement se traduisent tôt dans le développement de l’enfant par une indifférence aux états d’esprit d’autrui et une incapacité à respecter des règles de conduite.

Référence :
Decety J. et al. (2008), Who caused the pain? An fMRI investigation of empathy and intentionality in children, Neuropsychologia, online pub., doi:10.1016/j.neuropsychologia.2008.05.026

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