17.7.08

Deux espèces humaines en Europe

Homo sapiens a-t-il remplacé Homo neandertalensis en Europe, ou les deux espèces se sont-elles hybridées ? En d’autres termes, portons-nous des gènes de Neandertal ? Pour répondre à cette question, on peut procéder à l’examen des (rares) squelettes entiers pour essayer de trouver des formes hybrides. Ou bien analyser des fragments d’ADN pas trop endommagés que l’on extrait de ces squelettes. Cette seconde option, a priori moins sujette à caution que l’interprétation des traits anatomiques assez variables d’un individu à l’autre, a pour défaut la contamination potentielle des échantillons par de l’ADN moderne. La plupart des vestiges paléontologiques ont été mis à jour voici longtemps, bien avant la « révolution du gène », et les spécimens furent abondamment manipulés par les chercheurs.

Une équipe italienne dirigée par Guido Barbujani vient de contourner ce problème. Elle a analysé la région hypervariable I de l’ADN mitochondrial d’un spécimen de Cro-magnon (H. sapiens). Celui-ci avait vécu voici 28.000 ans, ses restes ont été découverts en 2003 dans la grotte de Paglicci, en Italie. Les chercheurs possédaient une liste complète des personnes ayant été en contact avec l’échantillon : ils ont donc pu analyser leur ADNmt afin de vérifier si l’éventuelle « pollution » moderne des séquences du Cro-Magnon. Résultat : les gènes de l’homme de Paglicci diffèrent de tous ceux des chercheurs ayant eu accès à lui, ce qui exclut donc une contamination récente. Ces gènes se retrouvent cependant dans les populations européennes actuelles, ce qui montrent la continuité locale d’Homo sapiens depuis 28.000 ans. Et ils ne se retrouvent pas chez l’homme de Neandertal, ce qui apporte un argument supplémentaire pour l’exclure de nos ancêtres.

Deux espèces humaines distinctes ont donc co-existé sans se mêler en Europe, voici quelques dizaines de milliers d’années.

Référence :
Caramelli D. et al. (2008), A 28,000 years old Cro-Magnon mtDNA sequence differs from all potentially contaminating modern sequences, PLoS ONE 3(7, e2700. doi:10.1371/journal.pone.0002700

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