12.5.08

Terroirs pleurnichards et fourneaux inventifs

Dans Le Monde, un appel de vignerons et de cuisiniers pour interdire les OGM. L’argumentation est assez fantaisiste, comme souvent avec ce thème : « Nous avons la liberté de choisir ceux qui nous plaisent pour nos vins et nos plats. C'est un droit fondamental que celui de choisir le contenu de son verre et de son assiette. Cette liberté et ce choix sont aujourd'hui menacés par les OGM et leurs conséquences inéluctables : industrialisation et standardisation de l'agriculture, dégradation et pollution des sols, uniformisation des semences et des goûts, atteintes à la biodiversité et menaces sur l'agriculture biologique. » Sauf à être de la plus parfaite mauvaise foi, on doit bien admettre que l’industrialisation et la technicisation de l’agriculture sont déjà des phénomènes largement avancés, avec ou sans OGM. Cela n’empêche pas les vignerons de proposer de bons vins ni les cuisiniers de trouver de bons ingrédients pour leurs mets. Inversement, rien n'interdit sur le principe d'utiliser le génie génétique pour ressusciter des cultivars anciens ou pour créer des espèces inédites. Les positions anti-OGM militent contre la liberté de choix entre filière bio, filière industrielle sans OGM, filière industrielle avec OGM, tout en essayant de transformer leur position d'interdit à base catastrophiste en défense de la liberté des consommateurs ou des producteurs.


Ceux qui en ont plus qu’assez des ces préjugés, pleurnicheries et prophéties de malheur pourront se changer les esprits en allant goûter jusqu’au 21 juillet la cuisine de Thierry Marx à la galerie le Laboratoire. Le chef étoilé de Cordeillan-Bages y propose des menus conçus avec le physicien Jérôme Bibette et réalisés selon le principe de destructuration / restructuration des saveurs. Cette gastronomie moléculaire repose sur la sphérification, formation de petites billes enrobant des molécules de saveurs : leur enveloppe est insipide et libère en bouche leur contenu. Une manière de faire évoluer la gastronomie, bien loin des lamentations convenues du terroir menacé…

Illustration : Bruno Cogez / Le Laboratoire.

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