La théorie de l’évolution est reconnue comme un puissant outil pour comprendre l’histoire des espèces. Mais, dit-on souvent, elle n’est guère utile pour le temps présent et futur, c’est-à-dire guère à même de faire des prédictions orientant notre action. À mesure que nos connaissances progressent en même temps que nos moyens d’observation en temps réel du vivant, cette objection est de moins en moins valable. Signe des temps : la première publication scientifique entièrement consacrée à la dimension « pratique » de l’évolution vient de voir le jour. Intitulée Evolutionary Applications, elle se donne pour vocation de mobiliser les outils de l’évolution pour traiter des questions biologiques ayant une pertinence sanitaire, sociale ou économique. Par exemple, la mise au point comme l’utilisation d’antibiotiques gagnent à être éclairées par l’exploration des mécanismes de multirésistance bactérienne, un cas d’école de la sélection naturelle (des bactéries mutantes survivent toujours aux molécules biocides, ce qui fait naître de nouvelles souches mieux adaptées à la contrainte que nous essayons de leur imposer).
Au-delà de l’intérêt scientifique de cette publication, dont les deux premiers numéros sont entièrement libres d’accès, c’est la portée épistémologique ou philosophique qu’il convient de mesurer. Loin d’être un amusement pour naturaliste ou une curiosité du programme scolaire, la théorie de l’évolution éclaire d’un jour nouveau le destin de notre espèce et de ses membres, ainsi que leur rapport avec le milieu. Une humanité progressivement consciente d’être le produit de l’évolution ne se comportera pas de la même manière qu’une humanité croyant être la création d’un dieu ou d’un esprit. Cet immense basculement ne fait que commencer, 150 ans après la parution de l’Origine des espèces.
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