27.10.08

Un zoophile à la FIAC : les flagrants délires de la France caporalisée

Décidément, les fonctionnaires français ne manquent pas de zèle pour réprimer les atteintes artistiques aux bonnes mœurs. La FIAC, qui s’achevait hier à Paris, a été l’occasion d’une nouvelle intervention des forces de l’ordre vertueux, contée par Aziz Zemouri pour Le Figaro Magazine : «Alerté par les douanes, le Parquet de Paris a saisi le Groupe Recherche et Investigation du 8ème arrondissement (dépendant de la Police urbaine de proximité) pour intervenir vendredi dernier, 24 octobre, au Grand Palais (…) Des photos pornographiques et d'autres à caractère zoophile de l'artiste russe Oleg Kulik étaient exposées. "Le délit est constitué avec circonstance aggravante quand elles sont visibles par des mineurs", indique une source judiciaire. Ce qui est le cas à la FIAC. Les policiers ont été pris à partie par une partie des visiteurs, ce qui les a obligés à mettre en place un cordon de sécurité. Deux personnes employées par l'artiste ont été interpellées et placées en garde-à-vue, avant d'être libérées le soir même. Les œuvres ont été prises en photos, retirées puis restituées au commissaire de l'exposition. Deux d'entre elles sont passibles de l'application de l'article 227-24 du code pénal sur la diffusion de photos de nature à porter atteinte à la dignité humaine. Elles mettent en scène un être humain et des animaux, suggérant des relations sexuelles.»

Je pensais que la «dignité humaine» était une arme de combat principalement destinée à réprimer les mauvaises idées des chercheurs, mais les artistes semblent soumis au même régime de rigueur par Code pénal interposé. L’artiste russe Oleg Kulik n’en est pourtant pas à sa première provocation, notamment dans le domaine animalier : une précédente performance (Deep into Russia) invitait le spectateur à enfourner sa tête dans le cul d’une vache (factice, précisons-le). Plutôt que de zoophilie, Kulik parle de «zoophrénie» et place ses œuvres ou performances dans l’optique d’un changement nécessaire selon lui des regards humains sur l’animal. On est tout à fait libre de considérer cela comme autant de provocations sans intérêt artistique. Mais y voir un matériel pornographique zoophile et tenter une saisie policière en pleine exposition relève d’une (peu) aimable plaisanterie. Après tout, le caporalisme anti-soixante-huitard a le vent en poupe et les Français n’ont qu’à se consoler de toutes ces horreurs en écoutant en boucle les mièvreries de madame Sarkozy.

Illustration : O. Kulik, Zebras, 2001, sur Artnet.

Précédent épisode de la brigade des mœurs artistiques : Le téton, la pince à linge et le psychisme des enfants.

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