23.10.08

Le cerveau, nouveau front de la guerre spiritualiste

Dans le New Scientist, un article sur le cerveau comme nouveau front de l’offensive créationniste (Intelligent Design). Le 11 septembre dernier, le psychiatre Jeffrey Schwartz (Université de Californie, Los Angeles) déclarait lors d’un symposium international sur les «nouveaux paradigmes dans la science de la conscience» : «On ne peut surestimer combien l’establishment scientifique est menacé par le fait que le paradigme matérialiste est aujourd’hui en train de s’écrouler complètement. On va vous dire, dès l’an prochain [2009, bicentenaire de Darwin et 150 ans de L’Origine des espèces], combien l’explication de Darwin sur l’émergence de l’intelligence est la seule voie scientifique possible… Il nous faut, comme communauté internationale, sortir de cela et dire à cet establishment scientifique : trop c’est trop ! Le matérialisme doit désormais reculer et la causalité non-matérialiste doit être comprise comme un élément de la réalité naturelle.» Un peu avant lui, le neuroscientifique canadien Mario Beauregard, auteur de The Spiritual Brain : A neuroscientist's case for the existence of the soul, avait qualifié de «guerre culturelle» le combat des chercheurs spiritualistes contre les chercheurs matérialistes. Une guerre où les instances créationnistes, comme le Discovery Institute, enrôlent sur le front de la conscience des scientifiques comme Michael Egnor ou des philosophes comme Angus Menuge. Et où des sociétés savantes engagées, comme l’International Society for Complexity, Information, and Design (ISCID), entendent promouvoir des travaux dégagés des «contraintes programmatiques comme le matérialisme, le naturalisme et le réductionnisme».

Les créationnistes ou partisan de l’Intelligent Design prospèrent sur les limites actuelles de la recherche scientifique. Au lieu des anciennes interprétations littérales de la Bible, leur nouvelle stratégie consiste à recruter des chercheurs et à produire un discours rationnel sur ce qu’ils estiment être les limites ou les contradictions du discours scientifique dominant sur l’origine de la vie et de l’esprit. Dans le domaine de l’évolution, les publications (rares) du biochimiste Michael Behe sur la «complexité irréductible» ou du mathématicien et philosophe William Demski sur l’«information complexe spécifié» n’ont pas vraiment bouleversé leurs collègues ni le cours de la science. Il est assez logique que la conscience devienne un terrain de prédilection des antimatérialistes, puisque son émergence depuis des bases purement physiques est considérée de longue date comme «le» grand enjeu des neurosciences, et aussi de la philosophie de l’esprit. Encore faut-il ré-asseoir pour cela un dualisme sérieusement en panne depuis Descartes (dualisme entre des états mentaux, immatériels, possédant des pouvoirs causaux, et des état physiques) et plutôt considéré aujourd’hui comme un vestige du musée des idées fausses.

Les créationnistes citent volontiers les publications de Jeffrey Schwartz. Ce chercheur a longtemps travaillé sur le trouble obsessionnel-compulsif et sur l’efficacité des thérapies cognitives-comportementales (TCC), à travers la neuroplasticité. Il en a plus récemment conçu des hypothèses élargies sur une approche quantique des relations esprit-cerveau (Schwartz 2005). Le problème est que ces travaux seuls n’avalisent rien de «surnaturel» : ils ne remettent pas en cause la clôture causale du monde physique, c’est-à-dire la démarche matérialiste-naturaliste qui est celle de presque tous les experts du cerveau. La neuroplasticité, qui explique le succès des TCC (et aussi bien les effets d’une pratique régulière de la méditation ou les restaurations cérébrofonctionnelles après lésion), est à l’œuvre dans tous les processus d’apprentissage des systèmes nerveux humains ou non-humains.

Qu’en pensent les chercheurs et philosophes matérialistes ? Pour Patricia Churchland, philosophe à l’Université de Californie (San Diego), ce genre d’extrapolation «est un argument de l’ignorance. Le fait qu’une chose ne soit pas actuellement expliquée ne signifie pas qu’elle ne le sera jamais, ni que l’on doit changer complètement notre neuroscience, et aussi bien notre physique». John Searle, lui aussi philosophe à l’Université de Californie (Berkeley), observe : «Le progrès scientifique est ralenti sur de nombreux fronts. Nous n’avons pas de traitement du cancer, mais cela n’implique pas que le cancer a des causes spirituelles». Owen Flanagan, professeur de philosophie et neurobiologie à l’Université Duke, souligne quant à lui : «Nous avons une nouvelle compréhension de la physique. Ce qui est considéré comme matériel a changé. (…) Mais ce que nous découvrons sera naturel, pas surnaturel». Andy Clark, professeur de logique et métaphysique, à l’Université d’Edimbourg, remarque à propos du raisonnement créationniste appliqué à la conscience : «C’est un virus mental particulièrement vicieux, parce qu’il repose sur des pensées ou considérations assez raisonnables. Les personnes concernées commencent par une observation du type ‘Oh regardez, nous pouvons changer notre cerveau en changeant juste notre esprit’, mais franchissent ensuite un pas en clamant que l’esprit doit être distingué du cerveau et n’a pas de base matérielle. Cela ne s’ensuit nullement. Il n’y a rien d’incroyable à ce que l’esprit change le cerveau si les états mentaux sont des états cérébraux : le cerveau change simplement le cerveau».

Référence :
Schwartz J. M. et al. (2005), Quantum theory in neuroscience and psychology : A neurophysical model of mind-brain interaction, Philosophical Transactions of the Royal Society of London, B, 360, 1458,1309-27. (Texte complet, pdf, anglais).

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Planète de croc magnon! C'est si simple pourtant. Le jour ou les scientifiques se pencheront sur le corps éthérique, nous aurons fait un pas, mais tant que nous restons bloqués uniquement sur le strict plan physique, nous stagnerons.

Anonyme a dit…

Les attaques du front spiritualiste paraissent plus sérieuses du côté des expériences de Libert qui tendent à démontrer que cerveau et esprit sont des choses distinctes. La conscience serait en mesure de remonter le temps( elle serait capable d'effectuer un retour en arrière pour synchroniser nos sensations avec les événements ).
Cela mériterait une chronique de votre part car je vous suis dans nombre de vos analyses.

C. a dit…

Michel : oui, c'est une bonne idée ce retour sur Libet, je ferai un papier là-dessus à l'occasion.

Anonyme a dit…

Les chéris, si 100 scientifiques, prenaient le temps de faire des exercices pour sortir de leur corps, ne serait ce qu'une heure par jour pendant un mois, c'est presque certain que 10% sortirait de leur corps, découvrirait leur corps astral, et là, les choses sérieuses pourraient commencer. Quelle est la force supra terrestre, qui empêche les gens d'avoir accès à cette information si évidente et si simple? Le corps éthérique, n'a pas grand chose à voir avec un dieu quelconque, il ne faut pas le rattacher à une croyance ou une religion il faudrait juste dépenser un peu d'argent, pour des recherches pour mieux le comprendre et l'observer.
C'est un double éthérique, qui a des mains, des bras, des doigts, et qui se meut dans l'espace, comme le corps physique à part que lui il peut voler. C'est tout simple mais il faut que les scientifiques l'observent eux-mêmes en faisant des exercices, c'est comme d'apprendre à faire du vélo ou à nager, cela parait ardu, mais c'est simple, la première semaine à passer et à s'accrocher un peu pour réussir. C'est Buhlman qui a les meilleurs exercices.

Le cerveau ne pourra être compris qu'avec l'exploration du corps éthérique.

Anonyme a dit…

Barbara Brennan, physicienne à la Nasa, parcours intéressant.

Guillaume Depardieu s'était fait amputer pensant ne plus souffrir de sa jambe, or il souffrait presque toujours autant, de son membre fantôme.

Je ne sais pas si les explications de la médecine sur le membre fantôme sont si justes en tout les cas, la souffrance est là.à

Des gens comme Barbara Brennan agissent par exemple sur les membres fantômes.

Article également intéressant, phénomème qui n'est pas pris en compte visiblement par la médecine traditionnelle. Pourtant, une information et des statistiques sur le sujet devraient exister.

http://www.retrouversonnord.be/MemoireCellulaire.htm