1.10.08

Primitives aspirations

Dans un texte célèbre («Des nuages et des horloges», in La connaissance objective), Karl Popper écrivait : «La méthode critique ou rationnelle consiste à laisser nos hypothèses mourir à notre place : c’est un exemple d’évolution exosomatique». Face à tout problème P, l’humain produit des tentatives de solution (TS1, TS2….TSn), engage un processus d’essai et erreur (EE), finit par résoudre le problème P, mais produit alors une nouvelle situation où il rencontre le problème P’. Et ainsi de suite. La rationalité critique consiste d’une part à multiplier les TS au lieu d’en répéter une seule ; d’autre part à organiser les EE pour maximiser la survie (minimiser les dommages). Ce qui est permis par la conscience d’ordre supérieur. Popper, qui parlait à une époque où la novlangue était moins répandue, soulignait que si Einstein laissait les hypothèses mourir à sa place, ce n’était pas le cas de «l’amibe» ni de «l’homme primitif». Le souci, c’est qu’il y a encore beaucoup de «primitifs» parmi nous, beaucoup de gens persuadés qu’un problème n’admet qu’une solution (la leur), que cette solution peut être imposée (d’en haut) et que la vie collective doit s’organiser tout entière autour d’elle. On le voit en ce moment avec la crise financière. Le premier réflexe, le plus populaire, c’est : le «système» ne va pas, on doit le remplacer très vite par un «autre système». Voilà le discours que le plus grand nombre a toujours envie d’entendre, même s’il est simpliste et grossier, et que ses petits dirigeants sont toujours prêts à lui servir. La très courte mémoire de ce grand nombre a de surcroît pour avantage que les vieilles erreurs se maquillent en idées nouvelles d’une génération l’autre.

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