22.10.08

Des humeurs et des ondes : la stimulation magnétique transcrânienne

Aux Etats-Unis, la société Neuronetics vient d’obtenir de la FDA l’autorisation de mise sur le marché de la stimulation magnétique transcrânienne comme traitement pour les dépressions sévères et résistantes aux autres médications. Les premières phases des essais cliniques de Neuronetics avaient montré une amélioration de l’humeur chez plus de la moitié des patients (n=164, pour un groupe total de 301).

La stimulation magnétique transcrânienne (TMS) consiste à poser sur le crâne du patient des électrodes qui produisent des champs magnétiques de basse fréquence. Ces ondes ont un effet local sur le cerveau humain, en stimulant ou en réprimant l’expression des neurones. La méthode est non invasive. Le protocole le plus courant est la TMS an applications répétées (rTMS) : des stimuli sont envoyés sur la région cérébrale d’intérêt plusieurs fois par secondes et plusieurs secondes de suite. Les paramètres d’applications sont alors multiples : nombre de stimuli par seconde, intensité de ces stimuli, intervalle entre les sessions… Dans le traitement de Neuronetics, les améliorations apparaissent dans un délai de 4 à 6 semaines, comparable au délai nécessaire pour observer les effets des antidépresseurs.

Le principe d’un stimulation externe du cerveau est connu depuis le XIXe siècle, mais les premiers essais électriques (életrochoc, aujourd’hui convulsivothérapie) n’ont pas laissé que de bons souvenirs. La TMS, qui utilise les ondes magnétiques plutôt qu’électriques, a été mise au point au début des années 1980. La tout premier essai sur l’homme a été rapporté en 1985 dans le Lancet par l’équipe du Pr Anthony Barker (Royaume-Uni). Cette expérience inaugurale avait pour but de montrer la conduction nerveuse entre le cortex moteur et la moelle épinière.

Les premières applications de la TMS concernent la recherche. Grâce à l’imagerie médicale (électro-encéphalographie, tomographie, imagerie par résonance magétique), les chercheurs sont capables de dire quelle zone du cerveau est activée lors d’une tâche cognitive. Mais cette activation neurale n’est pas pour autant un rapport de cause à effet. La TMS permet de le vérifier. Par exemple, des sujets doivent mémoriser une série de nombre ou lire un texte, pendant que la TMS inhibe une région de leur cortex préfrontal ou temporal. S’ils n’y parviennent pas, cela démontre que la région en question est causalement impliquée dans la tâche demandée. Plus de 3000 études parues depuis 20 ans et impliquant la TMS ont ainsi permis d’affiner la carte cognitive de notre cerveau. La neurobiologie du langage et de la mémoire a principalement bénéficié de ses apports. Il est à noter que certains chercheurs, comme Allan Snyder (Université de Sydney), ont montré que la TMS peut parfois améliorer les aptitudes des sujets sains, en calcul ou en dessin par exemple.

Outre la recherche, la TMS est également utilisée en médecine, en l’occurrence en neurologie et psychiatrie. Une de ses utilisations est la création de lésion virtuelle, afin de mieux comprendre la localisation neurologique des patients souffrant de troubles transitoires (comme les hallucinations par exemple). La TMS est également employée dans cette logique pour évaluer l’effet de certains médicaments psychotropes. Concernant les troubles mentaux proprement dit, la TMS est employé dans les cas sévères de dépression, de schizophrénie, de trouble obsessionnel compulsif, d’hallucination et de migraine. Les progrès attendus dans les prochaines années concernent notamment le couplage de la TMS avec des techniques d’imagerie cérébrale en temps réel, afin d’améliorer la précision des stimulations.

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