29.10.08

Neuro-imagerie de la haine ordinaire

On dit que la frontière enre l’amour et la haine ne tient qu’à un fil. Semir Zeki et John Paul Romaya sont allés vérifier le dicton dans le cerveau de 17 volontaires sains (dont 10 hommes, âgé moyen 34,8 ans). Les sujets devaient penser aussi intensément que possible à une personne qu’ils haïssent – ancienne liaison ou collègue de bureau le plus souvent, à l’exception d’une femme éprouvant une aversion définitive pour… un politicien. Ils avaient été préalablement sélectionnés sur cette base, c’est-à-dire sur l’existence d’une disposition haineuse envers un individu particulier. Un scanner IRM observait en direct leur activité cérébrale pendant qu’ils regardaient des images neutres ou – supplice suprême – l’image de l’être haï. Résultat : la haine active le gyrus frontal médian, le putamen droit, le cortex prémoteur et l’insula (bilatéralement). Le gyrus frontal supérieur droit est au contraire désactivé. La haine possède donc une signature cérébrale particulière, qui la distingue de la peur et de l’agressivité (impliquant l’amygdale) comme de la colère ou de la menace (impliquant l’hypothalamus, le cortex orbitofrontal et le cortex cingulaire antérieur). Et qu’en est-il de l’amour ? Une précédente étude avait montré que l’amour romantique active lui aussi le putamen et l’insula. Il y a donc bien un territoire commun entre les deux sentiments. Une des différences très nettes entre l’amour et la haine réside cependant dans la désactivation corticale. Le premier sentiment se traduit chez l’amoureux par une atténuation très nette des aires réservées au jugement et au raisonnement (ou l’on voit que l’amour rend effectivement aveugle). Il n’en va pas de même pour la haine, où la désactivation corticale reste très localisée. En d’autres termes, le haineux continue de concentrer son attention, soit pour préparer une situation de conflit (le cortex prémoteur est aussi en alerte), soit pour mijoter sa vengeance. Dont le plat se mange froid, comme chacun sait.

Référence :
Zeki S., J.P. Romaya (2008), Neural correlates of hate, PloS ONE, 3, 10, e3556, doi:10.1371/journal.pone.0003556.

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