Les adeptes des jeux sexuels de domination et soumission, dits aussi BDSM (bondage, discipline, sado-masochisme), sont-ils des individus déséquilibrés, ayant souffert de sévices dans leur jeunesse, incapables de savoir où est leur bien ? C’est probablement ce que pensent certaines associations féministes « antisexe » de type Chiennes de garde. C’est certainement ce que pense la Cour européenne des droits de l’homme, qui a condamné les pratiques SM entre adultes consentants (affaire Laskey, Jaggard et Brown vs Royaume-Uni, 1997). Et après tout, c’est peut-être votre avis.
Rien de tel toutefois que d’observer les faits plutôt que ses préjugés pour se forger une opinion. Et si possible de manière quantitative, au lieu de glaner deux ou trois anecdotes à la véracité douteuse et à la représentativité nulle. En bon adepte des grands nombres, Juliet Ritchers et ses collègues australiens ont interrogé 19.307 individus âgés de 16 à 59 ans sur leur comportement sexuel, sur leurs difficultés éventuelles en ce domaine, sur divers facteurs démographiques et psychosociaux. Il en ressort que 1,8 % des personnes sexuellement actives ont été impliquées dans une activité SM au cours de l’année précédant l’entretien (2,2 % des hommes, 1,3 % des femmes).
Portrait-robot de l’adepte des coups et blessures volontaires : par rapport à la moyenne de sa population, il est plus souvent gay, lesbienne ou bisexuel-le, il a plus souvent fait l’expérience du sexe oral ou anal, il a plus souvent utilisé des sex toys ou consommé du matériel classé X (internet ou télévision), il a eu plus d’un partenaire dans l’année écoulée. Côté biographique et psychologique : les SM n’ont pas plus connu de contraintes sexuelles que la moyenne de la population, ils ne sont pas plus malheureux ou anxieux que les autres – pour les hommes, c’est même le contraire, ils ont des scores moindres aux questionnaires de détresse psychologique.
Conclusion des scientifiques : « Notre étude soutient l’idée que le BDSM est simplement un intérêt sexuel ou une sous-culture attirante pour une minorité, et que pour la plupart des participants, elle n’est pas le symptôme psychopathologique d’un abus passé ou d’une difficulté avec le sexe ‘normal’ ». Pas de chance pour les bonnes âmes, il faudra donc faire le bien des SM malgré eux. Mais c’est peut-être une forme raffinée de supplice, qui sait ?
Référence :
Ritchers J. et al. (2008), Demographic and psychosocial features of participants in bondage and discipline, "sadomasochism" or dominance and submission (BDSM): Data from a national survey, J. Sex Med., online prepub., doi:10.1111/j.1743-6109.2008.00795.x
Illustration : Jennifer en détresse, Gilles Berquet, 2003 (galerie Clair Obscur).
1.4.08
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1 commentaire:
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En complément, pour s'instruire sur l'étonnante diversité humaine :
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