13.12.08

Dignitas Personae : Instruction pour la conservation en l'état du parc humain

En 1987, la Congrégation pour la doctrine de la foi publiait l’instruction Donum Vitae sous la houlette du cardinal Ratzinger. Il s’agissait des positions de l’Église catholique dans le domaine biomédical, que nous avions commentées ici. Vingt-un ans plus tard, ce 11 décembre 2008, la même Congrégation en publie une mise à jour intitulée Instruction Dignitas Personae sur certaines questions bio-éthique (on peut en télécharger la version intégrale anglaise sur ce site). Ratzinger, devenu Benoît XVI dans l’intervalle, contresigne le nouveau texte ayant pour auteur principal le préfet-cardinal William Levada.

Que la «dignité humaine» donnant son titre à l’Instruction soit brandie comme principal concept opératoire de l’Église catholique dans le domaine bio-éthique n’étonnera pas mes lecteurs : j’avais déjà signalé ici et ici combien ce concept creux sert d’étendard présentable à la croisade cléricale pour la négation de la liberté des individus dans le domaine de la sexualité, de la procréation et plus généralement des usages de son corps à l’âge de la biomédecine scientifique. De ce point de vue, Dignitas Personae ne fait que reprendre la très longue liste des interdits (actes «moralement illicites») décrétés par les promoteurs du dogme catholique. Le bon catholique devra donc éviter avortement sous toutes ses formes, dons des gamètes, congélation des embryons et des ovocytes, fécondation in vitro, micro-injection de spermatozoïdes, réduction embryonnaire en cas de grossesses multiples, diagnostic prénatal et diagnostic pré-implantaoire (DPN, DPI), clonage thérapeutique, clonage embryonnaire, culture et étude des cellules souches embryonnaires… à peu près toutes les innovations des 30 dernières années sont proscrites au cours des 37 articles de l’Instruction, à l’exception des protocoles thérapeutiques pour restaurer la fertilité d’un parent, du travail sur les cellules souches adultes et des thérapies géniques somatique à visée médicale uniquement.

Avec un certain comique involontaire, l’Instruction remarque dans sa conclusion : «certains diront que l’enseignement moral de l’Église contient de trop nombreux interdits. En réalité, son enseignement est fondé sur la reconnaissance et la promotion de tous les dons que le Créateur a placés en l’homme : comme la vie, la connaissance, la liberté et l’amour». Un éloge de la vie malade, subie, affaiblie, qui oblige les parents à transmettre leur maladie génétique à leurs enfants et l’enfant à accepter ce fardeau. Un éloge de la connaissance esclave de la foi, qui interdit certaines recherches contraires aux dogmes. Un éloge de la liberté surveillée, qui consiste à dresser la plus longue liste d’interdictions de toutes les fois contemporaines. Un éloge de l’amour enfin, probablement celui qui rend aveugle la raison.

Les deux «principes éthiques» sur lesquels s’appuie l’Église catholique sont d’une part la dignité de la personne (et son caractère sacré) dès les premiers instants de la conception ; d’autre part l’origine de toute vie humaine dans le «contexte authentique» du mariage, de la famille et de l’union amoureuse des conjoints pour l’acte de procréation. «Dès les premiers stages de son existence, note l’Instruction, le corps d’un être humain ne peut jamais être réduit à un groupe de cellules. Le corps humain embryonnaire se développe progressivement selon un programme bien défini ayant sa propre finalité, comme cela devient évident à la naissance de chaque bébé». Que bien des embryons donnent en tout et pour tout des fausses couches spontanées dans les premières semaines de grossesse, et d’autres des enfants atteints de pathologies graves, cela appartient sans doute à ce «programme bien défini» formant le socle de la «loi naturelle morale»...

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