Pour trouver une solution ou faire une estimation, plusieurs cerveaux valent mieux qu’un dans la plupart des cas. Si vous demandez « quelle est la hauteur Eiffel ? » à deux personnes, vous avez plus de chance que la moyenne de leurs réponses soit plus proche de la vérité que chaque réponse prise séparément. Et plus vous élargissez l’échantillon, plus cela se vérifie. On a qualifié le phénomène de « sagesse des foules » (James Surowiecki) – quoique les mêmes foules, en bien des domaines, se révèlent assez peu sages. Il a été identifié pour la première fois par Francis Galton, en 1907. Techniquement parlant, cette meilleure approximation de la moyenne d’un grand nombre d’approximations a pour condition que l’erreur de chaque individu soit statistiquement indépendante de l’erreur des autres.
Deux psychologues (Edward Vul du MIT et Harold Pashler de l’Université de Californie) se sont demandés si les vertus de cette moyenne se retrouvent lorsque l’on demande à un même individu de produire deux estimations. A priori, il n’y aurait pas lieu de le penser : l’individu est supposé donner en premier lieu sa meilleure estimation en fonction des informations dont il dispose. Une seconde estimation n’ajoute que du bruit. En fait, il n’en est rien. Vul et Pshler ont posé huit questions factuelles (du genre de la Tour Eiffel ci-dessus) à 428 personnes. La moitié donnait une seconde réponse juste après, l’autre moitié trois semaines plus tard. Il en ressort que la moyenne des deux réponses est plus précise que la première ; et que la distance temporelle améliore le résultat (6,5 % de meilleures réponses pour un second choix immédiat ; 16 % pour un second choix différé de trois semaines).
Ce résultat intéressant suggère que notre cognition fonctionne plutôt de manière probabiliste : elle sélectionne des estimations dans une distribution interne de probabilités, plutôt qu'elle ne produit de manière déterministe une estimation optimale sur la base de ce qui est connu. L’écart temporel améliorerait la qualité de l’estimation car il renforce l’indépendance du choix au sein de cette distribution. On peut se dire que la foule est en nous. Ou qu’il vaut toujours mieux réfléchir à deux fois.
Référence :
Vul E., H. Pashler (2008), Measuring the crowd within: Probabilistic representations within individuals, Psychological Science, 19, 7, 645-647, doi : 10.1111/j.1467-9280.2008.02136.x
2.8.08
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